On parle d’AMIS dans le Figaro

Le Figaro -29 juillet 2002
Des médecins au milieu de la course
Jean-Michel BADER, Journaliste

" Comment médicaliser les sports mécaniques lorsqu’ils se pratiquent loin de toute infrastructure, et hors de portée des véhicules médicalisés, comme c’est le cas pour les parcours de liaison des courses ..."

Avec l’aimable autorisation de reproduction du journal " Le Figaro ".

Nos remerciements à MP Ombredanne et JM Bader.
03. On parle d’AMIS dans le Figaro
Comment médicaliser les sports mécaniques lorsqu’ils se pratiquent loin de toute infrastructure, et hors de portée des véhicules médicalisés, comme c’est le cas pour les parcours de liaison des courses moto d’enduro ?

C’est pour répondre à cette question qu’est née en 1993 une association de médecins et de soignants bénévoles unique en Europe. Amis (Association médicale intersports), forte de 45 médecins, 15 secouristes, 5 kinés, envoie ses " motards en blanc " assurer la couverture médicale du Championnat de France d’enduro, des Six Jours internationaux, de nombreux rallyes raids africains, du rallye de Tunisie, du raid de l’amitié au Maroc et des courses classiques du calendrier national. Notre confrère Jean-Michel Bader, membre de cette association de médecins de course, nous emmène au coeur d’une épreuve.

Dans l’oreillette sous le casque intégral, un message est soudain crachoté du quartier général de la course : un blessé atteint d’une fracture du tibia sur le moto-cross de l’épreuve spéciale (chronométrée) n 1. Je pense aussitôt : " C’est pour Rémi et Martial. " Voici dix minutes que j’ai quitté la spéciale. A 80 km à l’heure dans le chemin rectiligne qui mène à la descente vertigineuse au pendant du pas de la Caze, au-dessus de Sainte-Enimie, je dois à la fois surveiller ma trajectoire et écouter les messages urgents.
Avec mon sac à dos bourré de matériel de réanimation, qui tire ses 12 kilos sur mes épaules, je m’applique à changer d’ornière, je soigne mes freinages et je tâche de ne pas trop perdre de temps ! Toutes les dix minutes, un obus à deux roues me double. Ce matin, avec le secouriste qui m’accompagne sur sa moto, notre binôme est parti dans les premiers numéros. Stéphane Peterhansel est déjà passé, Bernard Frétigné, Cyril Esquirol aussi, et tous les internationaux, le gratin des pilotes engagés (en tout ils sont 570), doublent les médecins de la course que nous sommes avec précaution, avant de disparaître dans le sentier qui serpente devant nous.

Cette version 2002 du Trèfle lozérien, course de trois jours autour de Mende, fait partie des courses " classiques " sous l’égide de la Fédération française de motocyclisme. Comme le Quadruple aveyronnais entre l’Aubrac et le Larzac, la Grappe de Cyrano dans le Périgord, ou l’Enduro du Touquet, elle mêle les meilleurs professionnels de la course à de purs amateurs. Si les premiers ont la cadence, le talent et l’entraînement qui permettent d’aller chatouiller le chronomètre, les autres " jardinent " nettement, se " tankent " dans les bourbiers, calent dans les grimpettes et parfois tombent dans les ravins. N’oublions pas qu’il s’agit d’un sport mécanique. En tant que tel, il faut donc assurer une solide couverture médicale car la pathologie sportive est variée et nombreuse : corps étrangers oculaires, entorses graves de genou, épaules déboîtées, crampes, fractures du poignet et du scaphoïde, moral à zéro, hypothermies, douleurs et froissements musculaires et tendineux de toute nature...

La réglementation sportive de la Fédération française de moto (FFM) précise que toutes les épreuves doivent avoir un chef du service médical (CSM) qui supervise l’ensemble des secours. Spécifiques aux épreuves du Championnat de France et des manches françaises du Championnat d’Europe, des règles émanant du collège médical de la FFM précisent qu’il faut, en plus du centre médical, un certain nombre de véhicules de type A d’intervention rapide (pour un secours immédiat et pour assurer une réanimation respiratoire et cardio-vasculaire), ainsi qu’un véhicule de type B (centre de réanimation mobile). Enfin, la fédération impose la présence obligatoire d’un matériel de communication par radio dans tous les véhicules médicaux.

Les médecins motards d’Amis sont désormais considérés par nombre d’organisateurs comme des véhicules de type A, capables d’assurer sur les parcours de liaison " aux endroits particulièrement difficiles du parcours " des actes de diagnostic et de secours immédiat, que ne peuvent effectuer des moyens habituels. " Il faut comprendre, explique M. Molinier, l’organisateur du Quadruple aveyronnais (une épreuve sur quatre jours autour de l’Aveyron), que nous traçons des parcours dans des vallées ou des gorges que des ambulances ou des camions 4 x 4 mettraient plusieurs heures à atteindre, quand existent des chemins carrossables. Et quand ce sont des sentiers inaccessibles, seules des motos passent. "

" Je me souviens sur le Quadruple aveyronnais, explique le docteur Jérome Feuillade, président d’Amis, avoir, dans un pierrier totalement inaccessible, à 10 km de tout vrai chemin, dans le Larzac, réduit une luxation d’épaule sur un concurrent. Je l’ai ensuite emmené comme passager sur ma moto pendant 8 km. Là, et seulement là, l’hélico a pu l’embarquer. " Un souvenir personnel : lors de la dernière Croisière normande, j’ai soigné un concurrent touché au genou lors d’une de ces épreuves spéciales " en ligne ". Le départ et l’arrivée en sont éloignés de plusieurs kilomètres, le tracé est souvent un petit sentier qui serpente entre les arbres et les bordures de champ. Aucun autre véhicule n’y passerait ! Pour éviter au malheureux blessé de se faire rouler dessus par les autres concurrents, il m’a fallu le prendre en selle jusqu’à la sortie du chemin ! Avec, dans le dos, les vociférations des autres concurrents arrêtés dans leur élan...

Pour les médecins, l’avantage de s’adresser à une population jeune et en bonne santé est évident. La plupart des sujets examinés ont une volonté farouche d’aller au bout de la course. Les évacuations médicales sont rares (2 sur 570 concurrents en trois jours). Pourtant, le soir, devant le camion médical installé au parc fermé, les " toubibs " voient défiler la plus belle collection de bleus, de zébrures, d’éraflures, d’hématomes, d’érosions cutanées et de coupures. Tous ces éclopés ne viennent chercher que de quoi calmer leurs multiples douleurs et courbatures, pour repartir de plus belle le lendemain. La bagarre sportive guérit tout...



Association loi 1901 AMIS : « Assistance Médicale Inter Sport » 06.61.22.87.46 - Dr Jérôme FEUILLADE : scmn.maurin@yahoo.fr
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